La finance islamique, via les banques islamiques, propose à leurs clients et aux investisseurs un ensemble de contrats permettant l’achat, la vente, la location ou tous types de transactions commerciales sans avoir recours au Riba conformément à la Charia.
Ces différents contrats constituent la base du fonctionnement de la Finance Islamique dans le monde. Ils permettent à l’économie de croître en dehors du recours à l’intérêt totalement illicite en Islam car source d’usure. Les contrats les plus couramment utilisés par les banques islamiques sont la Murabaha, la Musharaka, la Moudaraba, l’Ijara ou encore l’Istina.
La Murabaha
Dans cet article, nous allons nous intéresser plus particulièrement à la Murabaha. En effet, ce contrat qui, depuis quelques années, commence à être accessible en France dans le cadre du financement immobilier doit être expliqué. Comprendre sa nature et son fonctionnement est essentiel pour bien mesurer les différences avec un crédit usuraire.
La murabaha ne s’applique d’ailleurs pas uniquement au financement immobilier. Elle peut également concerner l’achat de produits mobiliers, de machines, de matières premières….
Les différences entre un prêt classique et la murabaha ?
Dans un crédit classique avec intérêt, la banque, in fine, ne prête pas d’argent mais LOUE de l’argent à son client, dans le temps, sur une durée déterminée en appliquant un coût à la transaction sous forme d’intérêts (Riba) ce qui est strictement interdit en Islam.
Pour éviter le Riba, il est donc nécessaire de transformer cette opération illicite en une transaction licite d’achat-revente avec marge bénéficiaire sans intérêt, tel que pratiqué dans tout commerce et conforme à la charia.
C’est la raison pour laquelle en finance islamique la banque va devoir, dans un premier temps, acheter le bien sur ses fonds propres afin de pouvoir se donner le droit de le revendre au client. Avant d’acquérir le bien, la banque islamique demande au client de lui signer une promesse d’achat qui l’engage à racheter le bien. En échange de ce service, la banque islamique applique au client une marge commerciale pour se rémunérer. Une marge bénéficiaire claire, fixe et déterminée à l’avance qui sera réglée par le client via des paiements échelonnés.
Une fois le bien acquis par la banque, celle-ci, lors d’une seconde transaction, le revend au client et lui transfère son titre de propriété. Le client devient alors propriétaire du bien. Il devra, bien sûr, honorer les échéances du paiement fractionné auprès de la banque (vendeur) mais il peut disposer du bien comme il l’entend.
Le rôle d’intermédiation de la banque islamique et le facteur risque
La “murabaha” est un terme de finance islamique qui signifie intermédiation. Dans une opération de Murabaha, l’institution financière (la banque) va, en effet servir d’intermédiaire entre l’acheteur (l’emprunteur) et le vendeur du produit.
En dépit du fait que la Murabaha soit l’un des modes de transactions les plus usités en Finance Islamique, certains contestent ce mode de transaction car ils considèrent que la marge commerciale se substitue aux intérêts et que la promesse d’achat faite à la banque par le client, avant l’acquisition du bien par cette dernière, annihile tout risque lié au déroulement de la transaction.
Sur le premier point, il est essentiel de rappeler qu’en finance islamique, la conformité d’une opération commerciale dépend avant tout du mode de transaction utilisée pour acquérir un bien ou un service, et non du fait que cette transaction puisse faire gagner de l’argent au vendeur. Dans ce cas, il n’y aurait tout simplement pas de commerce en Islam car aucun moyen de vivre de ce dernier. L’Islam n’interdit pas de s’enrichir, bien au contraire, mais dans un cadre strict et réglementé. Aucune règle en Islam n’interdit à une banque de monnayer ses services tant que l’opération est juste et transparente pour l’acheteur.
Quant à l’absence de risque encouru par la banque lors d’une opération de Murabaha, il faut savoir que ce risque est pourtant bien réel car la promesse d’achat du client ne garantit en rien la revente du bien par la banque, pas plus que le fait de mentionner dans le premier contrat, entre la banque et le fournisseur, la personne émettrice de l’ordre d’achat.
La banque va, en effet, devoir supporter les risques inhérents à la propriété du bien avant de le revendre au client. Pendant ce laps de temps, le bien peut subir des dommages et donc devenir invendable au client. Ce dernier peut également devenir infinançable si sa situation financière change, s’il perd son emploi, s’il est mis sous tutelle ou s’il décède rendant donc impossible la revente du bien.
La banque s’engage donc dans un processus dans lequel elle peut se retrouver avec un bien qui n’a plus d’acheteur. Pour récupérer le capital investi, elle devra alors trouver un autre preneur. Des risques importants non supportés par une banque classique.
De plus, la banque islamique ne dispose pas des moyens de coercition d’une banque classique en cas d’impayés du client. En effet, pour éviter le Riba, elle ne peut imposer des pénalités de retard au client car sa marge commerciale a été fixée une bonne fois pour toute et ne peut être modifiée.
Enfin, et c‘est à souligner, une banque islamique ne conditionnera jamais l’échelonnement du paiement du prix (un prêt d’argent) à l’obligation pour le client (l’emprunteur) de se doter d’une assurance pour le couvrir en cas de décès ou d’invalidité. C’est une part de risque supplémentaire qu’aucune banque classique ne consent à prendre afin de limiter au maximum les risques financiers dus à l’éventuelle insolvabilité financière du client.
Le risque est donc toujours présent dans le contrat de murabaha ce qui le rend conforme avec la charia.